Bénéfique tant pour l’éleveur que pour son troupeau, la mélangeuse est un outil qui se présente sur le marché sous bien des configurations. Il est donc essentiel d’évaluer avec soin l’ensemble des critères qui régissent sa conception afin d’opter pour la machine la plus adaptée à son exploitation.
« La mélangeuse est une machine qui, chaque jour, malaxe des tonnes de nourriture pour les animaux ». Cette phrase, prononcée par Jean-Hughes Henrot, directeur de Joskin-Distritech assurant l’importation de la marque Strautmann en Belgique, révèle à quel point il est crucial de choisir correctement sa mélangeuse et de l’utiliser au mieux pour en tirer le plein potentiel si l’on vise une maîtrise des coûts optimale dans l’exploitation.
Or, le choix proposé par les constructeurs est plutôt vaste, comme le confirme Jean-Hughes : « Dans notre gamme, des mélangeuses de 4 à 45 m³ sont disponibles. Des versions traînées ou automotrices coexistent dans certains segments de volume. Lorsque nous avons fixé le gabarit idéal avec l’acheteur, il reste à définir les options, c’est-à-dire presque tous les équipements de la machine, de façon à ce qu’elle corresponde exactement aux besoins de l’exploitation. C’est véritablement une conception à la carte ».
De manière générale, les mélangeuses les plus fréquemment rencontrées dans notre pays ont une capacité de 12 à 24 m³ et la machine-type la plus vendue actuellement correspond à une mélangeuse à double vis dotée d’un bol de 19 à 24 m³. Quant aux acheteurs, ils ont des profils très variés : éleveurs laitiers ou viandeux, troupeaux bovins, ovins ou caprins…
En production viandeuse se rencontraient très peu de mélangeuses auparavant. Aujourd’hui, la situation s’est inversée selon notre interlocuteur. « Je dirais que 80 % des chefs d’exploitations viandeuses ont compris l’utilité de ce matériel. En Blanc Bleu Belge, plusieurs clients m’ont rapporté qu’une vache trop grasse allait moins vite au taureau et que le taux de fécondité avait augmenté dans leur troupeau après l’arrivée de la mélangeuse, et cela grâce à un meilleur équilibre dans la ration alimentaire. »
Définir le volume du bol…
Quels sont les critères à considérer pour choisir la mélangeuse la plus adaptée ? Cette question, Jean-Hughes l’entend très régulièrement. « Comme je l’ai introduit ci-avant, la configuration d’une mélangeuse est un vrai cheminement, au cours duquel chaque élément doit faire l’objet d’une réflexion spécifique pour être choisi le plus judicieusement possible. »
La première question à envisager est sans nul doute celle du nombre d’animaux à alimenter en une fois. La réponse à cette question permet de cerner la capacité que devra avoir la machine, autrement dit de définir le volume du bol.
« En bovins par exemple, il faut considérer globalement six animaux par mètre cube. Les mélangeuses Strautmann sont évolutives grâce au recours à des rehausses. À titre d’exemple, une machine affichant une capacité de 19 m³ peut passer à 21 m³ avec des rehausses de 18 cm, et même à 24 m³ grâce à des rehausses de 36 cm. Ainsi, il est possible de s’adapter, si nécessaire, rapidement et à moindre coût à l’évolution d’un troupeau, sans avoir à changer de machine ou modifier fondamentalement ses pratiques de travail. »
… et étudier la disposition des lieux
La question suivante est tout aussi primordiale : il s’agit d’étudier consciencieusement la disposition des étables, de l’aire de remplissage et des chemins à parcourir pour relier ces zones. C’est une étape au cours de laquelle le vendeur et l’acheteur doivent se rendre ensemble dans les installations, envisager chaque phase de travail de la mélangeuse et son parcours pour alimenter les animaux. Il faut repérer les obstacles et s’assurer de la maniabilité de l’engin, étudier de près les accès et ouvertures tant au niveau de leur accessibilité que de leur largeur et leur hauteur.
Le mode de distribution doit aussi être analysé avec minutie car il conditionne directement la structure-même de la machine. Une trappe arrière est à disposer à droite si la nourriture est déversée à droite, ou à gauche dans le cas contraire. Si la nourriture est à déposer dans des bacs en hauteur, des allonges sont nécessaires.
« De manière générale, je conseille en outre souvent d’opter pour une trappe centrale arrière. L’acheteur y pense rarement de prime abord car ce n’est pas l’orifice dont il se sert le plus souvent. Mais, il peut se révéler très utile pour vider dans une loge, en formant un beau tas, des mélanges secs réalisés une ou deux fois par semaine, un mélange prémix… par exemple. »
« Je recommande également d’essayer les matériels convoités : les marques disposent de machines de démonstration. Il ne faut pas hésiter à demander un essai. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’éleveur va travailler chaque jour pendant de nombreuses années avec cette machine. Autant donc s’assurer dès le départ qu’elle convient aux exigences que l’on s’est fixées. Pour cela, rien de tel qu’un essai grandeur nature dans sa propre ferme… »
Disposer les trappes
Une fois ces questions de base résolues, voici venu le moment de configurer les équipements qui prendront place sur la machine, en débutant par les trappes. « Chez Strautmann, il existe de nombreuses possibilités de localisation des trappes de déchargement. Il y a cependant certaines limites : on ne peut, par exemple, pas installer à l’arrière une trappe à droite, une seconde à gauche et, enfin, une autre en position centrale pour la simple raison qu’il ne resterait alors plus suffisamment de tôle pleine. Structurellement, cela déforcerait la résistance et la solidité du bol de façon trop prononcée. »
A priori, il est préférable d’installer les trappes à l’avant de la mélangeuse car le conducteur a alors une excellente visibilité sur le déchargement, ce qui n’est pas le cas avec une trappe arrière. A contrario, celle-ci s’impose naturellement si la configuration des installations contraint le chauffeur à reculer dans l’étable pour nourrir la dernière bête.
Un système de paillage peut être intégré à la mélangeuse. Entraînée mécaniquement, la pailleuse est installée à l’avant pour des questions évidentes de limitation des organes de transmission. Avec pareil dispositif, sur les machines du constructeur germanique, le ballot de paille est placé dans le bol où il se défait par l’action de la vis, puis accède à un démêleur avant d’entrer dans la pailleuse proprement dite.
Le démêleur permet de fluidifier le flux de matière et occupe un espace supplémentaire entre le bol et la turbine, sous lequel est disposé un bac à pierres bien utile.
A priori, il est préférable d’installer les trappes à l’avant de la mélangeuse car le conducteur a alors une excellente visibilité sur le déchargement, ce qui n’est pas le cas avec une trappe arrière. A contrario, celle-ci s’impose naturellement si la configuration des installations contraint le chauffeur à reculer dans l’étable pour nourrir la dernière bête.
Un système de paillage peut être intégré à la mélangeuse. Entraînée mécaniquement, la pailleuse est installée à l’avant pour des questions évidentes de limitation des organes de transmission. Avec pareil dispositif, sur les machines du constructeur germanique, le ballot de paille est placé dans le bol où il se défait par l’action de la vis, puis accède à un démêleur avant d’entrer dans la pailleuse proprement dite.
Le démêleur permet de fluidifier le flux de matière et occupe un espace supplémentaire entre le bol et la turbine, sous lequel est disposé un bac à pierres bien utile.
« Lorsque les mélanges sont fréquents et rapprochés, ce n’est pas vraiment préjudiciable mais, avec des mélanges plus irréguliers et espacés comme ce peut être le cas en été par exemple, cela nécessite un nettoyage de la vis. Ce bord en inox, s’il est remplacé en temps et en heure, rend celle-ci presque inusable. Or, une vis qui s’use perd de la matière et devient plus fragile. Le risque d’affaissement complet survient souvent à partir du moment où elle ne mesure plus que 7 mm. »
« Tout cela dépend bien évidemment de la qualité des aciers utilisés. Il faut impérativement prêter une attention particulière à ce paramètre et comparer les qualités d’acier ! Comme dit en introduction, la mélangeuse brasse chaque jour des tonnes et des tonnes de marchandises, et cela souvent pendant de nombreuses années ; le meilleur acier est donc un gage de longévité ».
Des couteaux standards ou à balles
La vis définie, il faut l’équiper des bons couteaux. Pour ce faire, il faut bien cerner ce que l’on va mettre dans le bol. Outre les couteaux standards, polyvalents, des couteaux à balles sont envisageables lorsque l’on introduit beaucoup de ballots dans la machine.
Ceux-ci sont orientés vers le haut et leur distance par rapport au centre de la vis est supérieure. Cela permet de démêler la boule plus rapidement. Elle va donc descendre plus vite dans le bol pour se faire mélanger plus efficacement.
Les contre-couteaux peuvent, quant à eux, être mécaniques ou hydrauliques. Dans la plupart des cas, ils sont situés à l’avant gauche et à l’arrière droit, même si cette disposition peut changer par exemple selon les modes de déchargement choisis, mais ils sont toujours placés en vis-à-vis l’un de l’autre.
Le conseil : équiper la mélangeuse d’une boîte de vitesses
Bien entendu, il convient également de s’intéresser au tracteur qui actionnera la machine dans le cas d’une mélangeuse traînée, notamment afin de s’assurer qu’il développe une puissance suffisante. Jean-Hughes tient à intervenir sur ce sujet. « Parallèlement à la question de la puissance, il faut aussi se poser la question de savoir si l’on opte pour une boîte de vitesses sur la mélangeuse ou pas. Personnellement, je conseille toujours de prendre cette boîte de vitesses. En effet, beaucoup d’utilisateurs pensent que plus la vis tourne vite, mieux la marchandise est mélangée. Or, ce raisonnement est tout à fait faux. »
En même temps que la vitesse, la force centrifuge augmente également ; celle-ci éloigne la matière de la vis, réduisant d’autant le brassage. La force centrifuge dépendant aussi de la masse des produits, elle peut même effectuer un certain tri de ceux-ci en fonction de leur masse, à l’inverse donc du résultat du mélange recherché. « Pour bien mélanger, une vis ne doit donc pas tourner trop vite, d’où l’utilité d’une boîte de vitesses permettant de gérer au mieux la rotation de ladite vis. »
Un autre avantage est que cette boîte réduit la consommation. « Nous avons effectué quelques mesures lors d’une démonstration chez l’un de nos clients : en faisant tourner rapidement la vis, la consommation du tracteur était de 14 l/h. À petite vitesse, elle descendait à 8,5 l/h. Ces chiffres correspondent à des moyennes sur plusieurs mélanges. Cet essai est bien entendu purement indicatif mais il permet de se faire une idée quant à la pertinence d’une boîte de vitesses. Financièrement aussi car, avec une économie de 5,5 l/h comme dans la situation évoquée ci-avant, on peut considérer raisonnablement une économie de l’ordre de 2.000 l de carburant par an. Autrement dit, le coût initial de la boîte de vitesses est remboursé en une seule année… ».
Il faut aussi toujours, au niveau du tracteur, vérifier que le nombre de distributeurs hydrauliques est suffisant. Dans le cas contraire, l’ajout d’électrovannes s’impose pour pouvoir commander l’ensemble des fonctions hydrauliques de la machine.
L’électronique, pour se faciliter le travail
Les fonctionnalités du système de pesée doivent aussi être prises en compte. Il existe sur le marché des dispositifs de pesée basiques, qui additionnent les différentes fractions incorporées dans le bol. Chez Strautmann, les systèmes de pesée sont programmables, même si la programmation n’est pas obligatoire.
« Celle-ci permet à la machine de garder en mémoire les « recettes » des différentes rations pour chaque groupe d’animaux de l’exploitation. Il suffit à l’utilisateur d’encoder la recette pour un animal de chaque groupe ainsi que le nombre d’individus de ce groupe. Avec ces éléments en mémoire, l’ordinateur fait alors lui-même le calcul du poids de chaque produit à incorporer dans le mélange. » Le nombre d’animaux du groupe à nourrir peut être très facilement modifié, ce qui s’avère évidemment pratique lorsque ce paramètre fluctue fréquemment, comme ce peut être le cas dans les troupeaux laitiers par exemple.
Une télécommande peut être adjointe au système pour pouvoir communiquer à distance avec la mélangeuse, depuis la cabine du tracteur ou du télescopique, afin de modifier les différentes consignes. La possibilité est aussi donnée de connecter la mélangeuse à l’ordinateur de la ferme via Wi-Fi, et donc de permettre un transfert facile des données vers un programme de gestion de troupeau ou de gestion laitière.
« Un autre exemple me vient en tête, celui de quatre agriculteurs organisés en Cuma et ayant défini un prix horaire pour l’utilisation de la mélangeuse : le système de pesée programmable permet d’identifier l’utilisateur et ses rations propres à chaque mélange ; les données sont ensuite transférées par Wi-Fi sur le PC du gestionnaire qui peut facturer facilement et sans erreurs aux différents membres de la Cuma ».
Un modèle traîné ou une automotrice ?
Une question reste à débattre : vaut-il mieux un modèle traîné ou une automotrice ? « C’est effectivement une question qui mérite d’être posée », enchérit notre spécialiste.
« Le premier élément à prendre en compte, ce sont bien sûr les aspirations du client. D’une façon plus rationnelle, l’achat d’une automotrice ne se justifie guère dans les petites structures. Mais, au-delà de cette taille critique d’exploitation, je suis convaincu, à titre personnel, qu’une automotrice a des atouts indéniables à ne pas négliger. »
Elle permet de gagner beaucoup de temps, notamment pendant les phases de chargement. Avec ses quatre roues directionnelles, elle fait preuve d’une agilité et d’une maniabilité incomparables tant pour accéder aux étables que pour y évoluer.
« Mais, selon moi, l’automotrice fait surtout la différence lorsque l’on comptabilise les heures de fonctionnement des moteurs. Avec une automotrice, un seul moteur tourne, tandis qu’il en faut deux avec une machine traînée, celui du tracteur qui l’entraîne et celui de l’engin qui la charge. Cela donne un résultat très favorable pour l’automotrice au niveau des coûts de fonctionnement. »
Quant à l’investissement initial, il peut être assez comparable si l’on considère l’achat d’un tracteur et d’une mélangeuse traînée, d’une part, et celui d’une automotrice, d’autre part.
« Je vois encore un avantage en faveur de l’automotrice : toutes les fonctions sont hydrauliques ou hydrostatiques, comme l’avancement ou la mise en rotation de la vis. Ceci permet de régler très facilement les vitesses et régimes de rotation pour correspondre aux besoins exacts. Enfin, les automotrices Strautmann bénéficient d’un automate de chargement, leur permettant de travailler constamment au maximum de leur capacité, en s’adaptant automatiquement au produit à charger. »
Valoriser au mieux son achat
Une fois la mélangeuse acquise, encore faut-il l’utiliser correctement. Or, ce n’est pas toujours le cas et il s’avère précieux de se poser un peu et de réfléchir à ses pratiques avec cette machine. « C’est exact ! Au risque de me répéter, la mélangeuse brasse chaque jour une quantité d’argent considérable dans son bol. Ne pas l’utiliser efficacement peut donc générer des pertes financières non négligeables, et c’est dommage… Malheureusement, je constate que des éleveurs utilisent mal leur mélangeuse. »
Comme signalé ci-avant, il est inutile et préjudiciable de faire tourner la vis trop rapidement. Une deuxième manœuvre malhabile consiste à charger le bol dans un ordre aléatoire. Pour obtenir un bon mélange, il est préférable de charger du produit le plus léger vers le produit le plus lourd.
« Enfin, je soulignerais qu’il faut utiliser tout le potentiel du système de pesée pour confectionner les rations les plus équilibrées et, pour cela, l’efficacité du système de pesée est incomparable. J’en veux pour preuve le cas de ce client dont le système de pesée de sa mélangeuse est tombé en panne ; il a été contraint, pendant plusieurs jours, d’effectuer ses mélanges sans pouvoir compter sur la pesée, simplement en comptabilisant les bacs de son télescopique. A priori, on aurait pu penser que cette panne n’aurait guère d’incidence étant donné qu’il remplissait chaque jour sa mélangeuse avec le même télescopique et qu’il était donc en mesure d’estimer correctement le volume de ses bacs. Pourtant, la production laitière a commencé à décliner après deux jours seulement… »
Comme quoi, la mélangeuse peut être la machine la plus rentable d’une exploitation, sans compter qu’elle se révèle bénéfique sur le plan vétérinaire en favorisant la santé du troupeau grâce à une alimentation équilibrée. « De plus, elle amène davantage de calme dans l’étable. Lorsqu’il n’y a pas de mélangeuse et que le nourrissage s’opère produit par produit, les bêtes ne se bousculent pas quand l’éleveur distribue la paille. Mais… quand vient le tour de l’ensilage, les cornadis claquent en tous sens… »
N.H.